X-Men : Dark Phoenix
Sortez les mouchoirs… voilà, c’est terminé. C’est avec le film Dark Phoenix que l’univers X-Men de la Fox tire sa révérence. La prochaine fois que nous reverrons nos mutants préférés, ce sera dans plusieurs années et au sein du MCU. Comment clôturer efficacement une saga aussi longue ? Simon Kinberg a tranché. Habitué de longue date de la franchise X-Men, le producteur/scénariste devient ici réalisateur pour la première fois. Un choix risqué tout comme celui de l’arc narratif utilisé : Dark Phoenix. Pour les amateurs de comics, Dark Phoenix est un arc culte malgré son grand âge, une histoire riche et longue qui changera à jamais les X-Men. Une histoire qui avait déjà été adaptée au cinéma avec X-Men 3 : L’affrontement final et le résultat que l’on connaît… un film neuneu et bas du front qui n’avait plus rien de la finesse habituelle des X-Men et tout du blockbuster con-con de l’été. De plus, il avait mis la saga au placard pendant un moment avant qu’elle ne ressuscite brillamment avec X-Men First Class. Déjà producteur à l’époque de X-Men 3, cet ultime film ressemble donc pour Kinberg à une sorte de revanche, une dernière chance avant de partir pour réhabiliter une histoire culte. Alors que vaut ce baroud d’honneur des mutants les plus célèbres de la planète ? Est-ce que l’on a enfin eu droit à un film Dark Phoenix potable ? Est-ce que Kinberg était à la hauteur ? Je lance Cerebro pour analyser tout ça.
You’re special Jean
Suite aux événements de X-Men Apocalypse, dans lequel l’équipe de mutants de Charles Xavier avait réussi à sauver l’humanité, le monde est en paix. Une paix fragile mais une paix quand même que Charles Xavier s’emploie à faire durer. Ses X-Men sont considérés comme des héros, les mutants sont mieux acceptés, Magneto s’est rangé, tout semble aller pour le mieux. Alors quand le président des Etats-Unis en personne fait appel à lui et son équipe pour sauver des astronautes en péril, le professeur X n’hésite pas et envoie la fine fleur des X-Men dans l’espace pour les sauver. Un sauvetage risqué mais faisable… jusqu’à l’arrivée d’un imprévu. Une sorte d’éruption solaire étrange a fait son apparition à proximité de la navette spatiale et semble se diriger vers elle. Voulant absolument ramener tout le monde en vie, Charles demande aux X-Men de prendre des risques inconsidérés. Jean, en sauvant les autres, se retrouve coincée dans la navette et prend de plein fouet l’éruption solaire. Miraculeusement elle y survit mais quelque chose en elle a changé, ses pouvoirs se décuplent, des souvenirs longtemps enfouis refont surface… et si ce n’était pas une éruption solaire qui l’avait frappée de plein fouet dans l’espace mais tout autre chose ? Une chose dotée d’un pouvoir incommensurable…
Est-il possible d’adapter une saga de comics aussi longue et riche que Dark Phoenix en un seul film ? La réponse est non, en tout cas pas sans faire de grosses coupes. Inutile donc d’espérer voir tout le volet « cosmique » de la saga au cinéma, nous ne verrons jamais l’empire Shi’ar, etc., le film préférant se restreindre à la planète Terre et aux X-Men. Une idée compréhensible, autant du point de vue du budget que du temps d’adaptation disponible, qui donne naissance à un film à l’ambiance sombre et assez intimiste. Dark Phoenix, c’est d’abord une histoire de famille, une famille dysfonctionnelle avec des pouvoirs. Et sur cet aspect, le film vise assez juste. Voir une Jean Grey perdue, déchirée par ses pulsions est une chose marquante, encore plus quand Charles Xavier et ses amis désespérés tentent de la sauver. Encore une fois les acteurs majeurs de la saga font le travail. Que ce soit James McAvoy, Michael Fassbender ou Sophie Turner, tous livrent une prestation plus que solide et font honneur à leurs personnages. Malheureusement cet ultime chapitre souffre d’un mal qui touchait déjà X-Men Apocalypse, à savoir une galerie de personnages inégale. Car si Jean Grey est une réussite, au même titre que Charles Xavier, Magneto ou encore le Fauve, on ne peut pas en dire autant du reste de l’équipe. Storm, la confrérie de Magneto, Quicksilver (qui n’aura malheureusement pas droit ici à sa séquence badass habituelle) ou encore Cyclope sont relégués au second plan, voués à rester d’éternels seconds couteaux alors que l’on connait leur importance dans les comics.
C’est d’autant plus dommage pour le personnage de Cyclope, leader charismatique et personnage parfois ambigu dans les BD, qui ne restera dans l’univers cinématographique de la Fox qu’un mec qui tire des lasers avec ses yeux et qui est amoureux de Jean. Enfin il s’en tire plutôt bien vu que certains personnages disparaissent carrément sans laisser de trace, comme Jubilee que les fans n’auront donc vu que quelques secondes dans Apocalypse. Tant pis, il faudra faire avec. On se console quand même grâce à la Jean Grey ultra convaincante de Sophie Turner qui, avec Magneto et Charles Xavier, est le seul personnage qui marquera autant les spectateurs que sa version précédente (celle vue dans la première trilogie X-Men). Une Jean Grey qui semble impossible à stopper, ce qui donnera lieu à certaines scènes d’action des plus réussies. Notamment cette attaque nocturne avec un Magneto venu en découdre pendant que Charles et les X-Men tentent de stopper l’affrontement entre lui et Jean. Le film fait beaucoup moins dans la démesure que Apocalypse mais étant donné que l’on assiste à une lutte quasi familiale, l’impact est aussi fort, voire plus.
Car ici, la méchante, c’est Jean, même si cette dernière est manipulée par une race extraterrestre (une version Fox des D’Bari des comics) dont la chef est jouée par Jessica Chastain. Une perspective alléchante mais qui échoue. Le personnage de Jessica Chastain reste bien trop cliché pour passionner, l’actrice surjoue beaucoup, ce qui en fait au final un méchant bien trop conventionnel uniquement là pour servir de chair à canon avec ses hommes pour l’acte final. On aurait espéré mieux mais ça résume un autre mal qui frappe le film, tout ce qui s’éloigne des 4 ou 5 personnages principaux est trop fade et pas assez travaillé. Manque de temps ? Manque de moyens ? Kinberg essaie, ça ne marche pas. Il est bon de signaler que le film est porté par une bande-son absolument énorme qui renforce encore plus l’intensité de certaines scènes. On repensera très longtemps au sublime thème composé par Hans Zimmer (cherchez Dark Phoenix Gap – Hans Zimmer sur Youtube) qui est d’une puissance évocatrice peu commune et qui se classe dans le très haut du panier de ce qu’a composé ce grand monsieur.
This is your fault Charles
Dark Phoenix est un film bancal, pas bien équilibré comme on l’a vu plus haut mais il reste un film X-Men et, comme ses prédécesseurs, il a toujours des choses intéressantes à raconter et des thèmes à aborder. On y parle d’évolution, de sentiments, doit-on mentir à ses proches pour les protéger ? Quelle trace laisse-t-on lors de notre vie ? Faut-il tuer le père pour s’émanciper ? On y parle de vengeance et de pardon, de peur et d’acceptation, le tout avec le personnage de Jean comme vecteur. Oui, on rit peu dans Dark Phoenix, il n’y a pas de punchline, l’ambiance est sombre et pesante et la fin se veut douce amère mais on est surtout encore une fois touché par certains personnages d’une justesse très appréciable dans l’univers trop formaté des films de super héros. La façon dont est traité Charles Xavier dans le film est d’ailleurs extrêmement intéressante. Pour la première fois, le personnage est mis face à ses contradictions, face à ses choix, face à ses erreurs.
On explore un peu les zones d’ombre du mentor des X-Men qui tel un vrai père peut parfois faire du mal sans le vouloir à ses enfants. Quand le générique défilera sur l’écran, beaucoup seront déçus. Déçus parce que ce n’est pas une fin « définitive », d’autres films auraient très bien pu voir le jour. Déçus parce qu’au final malgré son ton sombre, il y a peu de morts marquantes (deux qui étaient attendues… les bandes annonces et le titre de cet opus en disant long) dans le film. Ce n’est pas le cataclysme que certains attendaient. On pourrait regretter que le film n’ait pas pris plus de risque mais d’un autre côté le principal est assuré, Dark Phoenix est un film X-Men pur jus qui ne trahit pas la saga et surtout, il propose une bien meilleure lecture de l’arc Dark Phoenix que X-Men 3 en son temps. C’est déjà ça. Focalisé sur ses personnages clés et leurs problématiques, les déchirements liés à l’évolution et aux besoins d’émancipation, les choix, l’ultime volet de la saga X-Men se termine sur une note plutôt positive et nostalgique loin, très loin de la catastrophe industrielle annoncée par certains.
Oui ça aurait pu être mieux, on aurait voulu une trilogie Dark Phoenix pour finir en beauté… Si en tant qu’ultime chapitre, le film ne remplit pas entièrement son contrat, il reste un bon film X-Men, touchant et surtout une fin tout à fait honorable pour la saga. A l’heure où tout ce qui n’est pas copié/collé sur le MCU se prend une tôle au niveau des critiques, il est important de savoir savourer ce Dark Phoenix à sa juste valeur, comme un film sombre, adulte, sans punchline, sans gag lourdingue et avec du fond. A l’instar de Batman v Superman, il pourrait bien être le dernier représentant de son espèce, l’ultime chant du cygne pour les films de super héros sombres et matures. Allez Simon, ce n’était pas parfait mais tu as bien rattrapé le coup par rapport à X-Men 3, le film va sûrement mal marcher au box office mais tu pourras te regarder dans la glace et te dire que tu as fait honneur aux X-Men. Un premier film en tant que réalisateur pour un dernier film clôturant une saga, la vie est parfois malicieuse dans ses hasards et ses coïncidences. Adieu X-Men… on se revoit dans 4-5 ans pour une version MCU probablement fortement édulcorée ?
Post publié par Damzé le 21/10/2019 05:20
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