Zone Dubitative

Ragnarok [saison 1]

On aurait tendance à l'oublier, tant certains présentent Netflix comme le vilain ogre américain venant pervertir les jeunes avec ses séries US, mais la plateforme de séries et films en streaming accorde un soin tout particulier à la diversité de ses contenus. Dans le style évidemment mais aussi dans les origines. On peut trouver sur Netflix des séries françaises (Marseille, Marianne, Mortel, etc.) et récemment on a pu voir une production TF1/Netflix nommée Le bazar de la charité. En vérité, on peut trouver sur Netflix des séries d'un peu partout, ce qui est plutôt agréable tellement la façon de produire un show et d'aborder certains sujets diffère d'un pays à l'autre. Si je vous parle de ça, c'est parce qu'aujourd'hui nous allons nous attarder sur la première saison de Ragnarok, une série Netflix dano-norvégienne.

 

Fjords, ados...

Magne et Laurits, deux frères adolescents, emménagent dans la ville d'Edda à cause du changement de travail de leur mère. Une ville soumise à la puissante famille Jutul dont le patriarche dirige une entreprise qui est le plus gros employeur de la région. A peine arrivé, Magne, en décidant d'aider un vieux monsieur en chaise roulante, va voir sa vie basculer totalement. Alors qu'une vieille dame lui effleure le front en lui parlant de manière cryptique, quelque chose s'éveille en lui. Tout en gérant ces changements, il va devoir essayer de s'intégrer dans son nouveau lycée. Mais Edda cache bien des mystères dont certains enfouis depuis des temps anciens.

Vous l'aurez compris rien qu'au titre, Ragnarok est une série teintée de références à la mythologie nordique. A première vue, on pourrait être déçu qu'elle soit une série avec des adolescents puisque c'est souvent synonyme de triangle amoureux, d'histoires de cœur un peu gnangnan et de problématiques toutes faites à base d'acceptation et de “pouvoir de l'amitié”. Or Ragnarok, dès ses premières minutes, nous montre que ce ne sera pas le cas. Au cours des 6 épisodes qui composent cette première saison, Ragnarok va même habilement éviter la plupart des clichés qui plombent habituellement ce genre de séries. Premièrement grâce à son héros. Magne n'est pas un ado ténébreux, bien sapé, avec du gel dans les cheveux et un regard mystérieux. Non, il est habillé avec des fringues pas chères et sans marque, il a des cheveux normaux, il n'a ni la carrure d'un quarterback, ni la dégaine d'une gravure de mode et il a des difficultés en classe car il est dyslexique. Ce n'est pas le cool kid de la classe mais juste un élève un peu renfermé sur lui-même, loin des fêtards de service et des accros à Instagram. Beaucoup pourront s’identifier à lui, bien plus qu'aux bellâtres qui peuplent habituellement les séries pour ado, car même si Magne n'est pas le plus cool du lycée, il reste un personnage attachant et sincère. Et ce traitement va s'appliquer à la plupart des autres protagonistes. Que ce soit le lycée dans lequel évoluent nos héros ou la ville d'Edda, tout ce que l'on voit à l'écran semble bien plus vrai et naturel que dans la plupart des séries du même genre. Signalons d'ailleurs la présence de superbes plans en extérieur, Ragnarok étant tournée en Norvège, les showrunners auraient eu tort de se priver de tels décors naturels absolument sublimes et dépaysants. Ensuite, les problématiques adolescentes sont abordées avec sobriété, sans la grandiloquence habituelle qui dégouline en masse dans les séries US (comme le Riverdale de la CW par exemple). L'un des thèmes principaux est même lié à l'écologie. La pollution, le monde que l'on veut laisser à nos enfants, l'influence des grands groupes polluants dans la politique, ce genre de thèmes ont tout du sujet piège et pourtant Ragnarok n'en fait jamais trop et opte, là encore, pour une approche assez sobre pour aborder ces problèmes.

 

... et mythologie nordique

Puis il y a bien sûr la mythologie nordique ! Que ce soit juste des noms (comme celui de la ville d'Edda qui est une référence à l'Edda poétique, un ensemble de poèmes qui fait référence à la mythologie scandinave), ou certains détails visuels (on peut y voir par exemple la présence de corbeaux, rappelant Hugin et Munin, les corbeaux d'Odin), Ragnarok distille souvent moult références que le connaisseur se fera un plaisir de repérer. Si la série adopte un traitement réaliste sur bien des points, le surnaturel est évidemment de la partie. Une introduction en douceur via Magne, qui se découvre de nouvelles capacités (il n'a subitement plus besoin de lunettes, il devient plus fort, etc.) avant une accélération progressive suite à un événement tragique qui va pousser le jeune homme à entrer en confrontation avec les Jutul, une puissante et énigmatique famille semblant avoir la mainmise sur toute la ville. Il se dégage de tout ça une ambiance vraiment prenante. L'incursion du surnaturel dans l'histoire donne envie d'en voir et d'en savoir plus, le scénario tient bien la route, le ton est frais et original et le cadre est dépaysant. Petit point important sur la VF/VO. La VF de la série n'est clairement pas une grande réussite et enlève beaucoup au jeu des acteurs, ce qui est aussi valable pour la version anglaise. Dans ce cas, quelle version choisir ? Tout simplement la version originale en norvégien (vraiment un plus en termes d'immersion) !

 


Avant que le monde ne s'effondre…
Quand Netflix a annoncé une série teintée de mythologie nordique, beaucoup ont été déçus de constater que les protagonistes étaient des adolescents. A l'arrivée, Ragnarok est une belle surprise. Grâce à son côté réaliste et sobre, elle évite les écueils habituels des séries pour ados. Mieux, les éléments surnaturels inspirés de la mythologie nordique couplés au cadre de tournage, lui donnent un côté frais, original et une ambiance vraiment à part. Composée uniquement de six épisodes, cette première saison ne se perd jamais en intrigues inutiles et délivre une histoire intéressante avec des personnages bien écrits. Le glissement vers le surnaturel, progressif, est vraiment bien géré et les fanas de mythologie se feront un malin plaisir de dénicher les nombreuses références disséminées un peu partout. Avec Ragnarok, Netflix prouve qu'on peut encore faire des séries avec des adolescents sans tomber dans les clichés habituels. C'est original, les thèmes abordés sont intéressants et les six épisodes tiennent facilement le spectateur en haleine jusqu'à la fin. Une bonne surprise que l'on n’attendait pas forcément. Ne reste plus qu'à espérer que la série sera renouvelée pour une saison 2.

 

 

Post publié par Damzé le 26/02/2020 11:32

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