Zone Dubitative

Le dernier mercenaire

Si je vous dis JVCD, ça vous évoque quoi ? Pour moi ? Bloodsport, Le Grand Tournoi, Full Contact, Cavale sans issue, Chasse à l’homme, Universal Soldier, Piège à Hong-Kong… et même le fameux Street Fighter. Comme beaucoup de fans de films d’action des années 80-90, j’ai été biberonné aux films de Jean-Claude « The muscles from Brussels » Van Damme. Un acteur dont la carrière aura connu des hauts (vraiment très hauts tant il régna d’une main de maître sur le genre action pendant des années) et des bas (vraiment très bas, avec une fin de carrière compliquée, des excès, etc.) mais qui n’aura jamais perdu son capital sympathie auprès d’une grande partie du public. Car oui, on a tendance à l’aimer Jean-Claude. Parfois, il en a trop fait, parfois il a dérapé mais on ne peut pas lui enlever cette sincérité touchante ou ce côté sensible, à fleur de peau dont il a toujours fait preuve. Souvent moqué, raillé, pris de haut, JVCD reste encore aujourd’hui un acteur dont on aime avoir des nouvelles même quand il joue dans un nanar en direct to dvd.

Et si ses derniers projets n’ont pas tous été emballants, il y a quand même eu quelques belles réussites comme son rôle de méchant dans l’excellent Expandables 2 (réalisé par Simon West, si vous aimez Les ailes de l’enfer avec Nicholas Cage, sachez que vous êtes quelqu’un qui a du goût) ou encore la série très barrée et décalée Jean-Claude Van Johnson sur Prime Video (qui n’aura eu droit qu’à une seule saison malheureusement). Deux réussites qui commencent à dater un peu… Alors forcément, quand on annonce un nouveau projet avec JCVD, un vrai film, sur Netflix, avec du budget et une campagne marketing, il y a de quoi frétiller de joie pour les fans. Réalisé par David Charhon, Le dernier mercenaire est récemment sorti sur le service de SVOD. Est-ce un retour gagnant pour l’ami Jean-Claude ? Enfin un projet digne de lui, apte à le relancer pour quelques films ? Ou est-ce que nous sommes face à une énième daube qui sera vite vue et vite oubliée ? Commencez vos étirements, on part sur une critique en grand écart facial !

 

À l'ancienne ?

Richard Brumère, dit la brume, est une légende vivante. Ancien des services secrets porté disparu depuis 25 ans, il est devenu un mercenaire ultra réputé et surtout insaisissable. Mais quand son fils, un ado qu’il n’a jamais connu, se retrouve en danger et accusé à tort de trafic d’armes et de drogues à cause de la boulette d’un bureaucrate du ministère des affaires étrangères, Richard n’a plus le choix, il doit refaire surface pour tenter de le sauver.

Annoncée comme une comédie d’action voulant rendre hommage aux films des années 90, Le dernier mercenaire (LDM) ne propose aucune tromperie sur la marchandise… en tout cas si on inspecte les ingrédients de base qui la composent. On y retrouve la recette de ces films à l’ancienne, à savoir de l’action, de l’humour, un peu d’émotion et une équipe composée de personnages improbables. La bonne surprise du film reste indéniablement la performance de Jean-Claude Van Damme. A 60 ans passés, l’acteur apparaît ici en grande forme.Il joue bien, délivre son quota de coups de tatanes et de bourres-pifs, cabotine un peu par moment mais juste ce qu’il faut et c’est un réel plaisir de le revoir enfin à l’affiche d’un projet avec un vrai marketing derrière. Le scénario est lui aussi bien dans la veine de ce qui se faisait il y a quelques années, avant la mode des gros blockbusters gavés d’effets spéciaux avec une histoire simple mais efficace. Forcé de faire équipe avec des bras cassés et des fortes têtes, Richard Brumère va avoir fort à faire. Déjà il va devoir gérer la rencontre avec son fils Archibald alors qu’ils ne se connaissent pas et qu’ils sont très différents. Puis il va aussi falloir gérer les amis de son fils, à savoir Dalila, une jeune fille impulsive, et Momo, un livreur partisan du moindre effort. Sans oublier Alexandre (joué par Alban Ivanov), l’employé du ministère des affaires étrangères responsable de la boulette ayant tout déclenché. Ensemble, ils vont devoir prouver l’innocence d’Archibald et faire face à un ennemi déjanté faisant une grosse fixette sur Tony Montana, le tout en déjouant les manigances du Commandant Jouard (incarné par Patrick Timsit), bien décidé à faire arrêter Richard.

Il découle de tout ça un joyeux foutoir dans lequel les scènes d’action et de comédie s'enchaînent sans temps morts du début à la fin. Des scènes d’action assez réussies même si parfois on voit bien qu’une doublure est utilisée (rappelons que l’ami Jean-Claude a 60 balais ! On pourra s’estimer heureux si on arrive au même âge dans le même état de forme). Globalement elles font donc le travail même si le résultat final n’arrive pas à la cheville d’un Van Damme de la bonne époque. On sent bien que David Charhon aime JCVD et les films d’action des années 90, l’hommage est parfois visible et quand tout fonctionne, quand les différents ingrédients de LDM se mélangent bien, on ne peut s’empêcher d’esquisser un sourire, encore plus quand on sent que JCVD s’amuse comme un petit fou. Malheureusement ça n’arrive que très rarement et les quelques scènes d’action sympathiques et drôles sont quasiment tout ce que le film a de correct à proposer car pour le reste, le constat est loin d’être glorieux.

 

JCVD perdu dans la brume

En ce qui concerne l’humour, on frôle trop souvent la catastrophe. Si certaines scènes sont vraiment sympathiques (comme Van Damme qui danse, le délire avec les déguisements et les perruques), beaucoup d’autres sont beaucoup moins bien dosées. Si on prend les pitreries d’Alban Ivanov par exemple, certains passages sont bons (comme l’utilisation du fait que son personnage soit un adepte du pole dance) alors que d’autres sont vraiment ratés (comme la poursuite sur la trottinette en slip bien trop longue et lourdingue). Un constat valable pour beaucoup trop de membres du casting, notamment Patrick Timsit qui alterne entre répliques vraiment drôles et gigantesques forçages surjoués ou encore Dalila, jeune fille de banlieue jouée comme dans les années 2000 en mode « vas-y keskya wesh ? ». Un humour qui finit même parfois par provoquer un gros malaise quand il frôle l’humiliation pour JVCD avec une certaine scène en particulier, vers la fin du film, qui me fait encore cauchemarder certaines nuits. Sur les 2H que dure LDM, on pourrait facilement dégraisser et enlever un bon quart d’heure, voire 20 minutes de moments loupés et/ou gênants afin d’obtenir un meilleur film… ou en tout cas quelque chose de plus regardable.

En termes de réalisation, en dehors des quelques scènes d’action sympathiques déjà évoquées plus haut, il n’y a rien d’exceptionnel, c’est même plutôt l’inverse tant le film propose quelque chose de convenu voire même fainéant ou presque honteux avec son lot de faux raccords et de passages montés avec le cul. Il faut bien avouer que David Charhon n’a pas un CV des plus attrayants puisque c’est lui qui avait commis, entre autres, l’immense bouse cinématographique Cyprien avec Elie Semoun. Il a beau être éminemment sympathique en interview, ça ne le transforme pas en bon réalisateur pour autant.

Enfin, il y aurait aussi beaucoup à dire concernant la direction d’acteurs (est-ce qu’il y en avait vraiment une d’ailleurs ?) tant certains semblent en totales roues libres. Samir Decazza est insupportablement nul dans le rôle d’Archibald, Momo est “joué” (si on peut appeler ça joué) par l’humoriste Djimo qui est en service minimum, Eric Judor en fait des caisses comme dans ses pires films avec Ramzy, etc. Hormis celle de JCVD, peu de prestations sont mémorables. Il se dégage de tout ça un côté “film de branleurs”, shooté les mains dans les poches après avoir pris le chèque, typique du cinéma français dans lequel les 3/4 du casting semble être composé de gens sans vrai talent juste venus là pour cachetonner un peu car ils sont “les potes du copain de” ou les petits rigolos vaguement à la mode sur le moment.

 


Le dernier gâchis ?
On attendait le grand retour de Van Damme ou un joli baroud d’honneur, malheureusement ce ne sera ni l’un ni l’autre. Sans être une totale daube, mais frôlant quand même dangereusement la catastrophe bien trop souvent, Le dernier mercenaire n’est clairement pas au niveau des films auxquels il tente de rendre hommage. Bien plus proche d’un direct to dvd tout juste assez sympatoche pour faire passer 2H quand il fait mauvais dehors que d’un vrai bon film à l’ancienne, le projet accumule trop de défauts qui finissent par le plomber. On pense notamment à la réalisation vraiment bof et sans effort, à la direction d’acteurs aux abonnées absentes et à l’humour extrêmement mal géré. Le dernier mercenaire souffre de défauts connus qui touchent une grosse partie du cinéma français : des gens qui font et/ou qui jouent dans un film uniquement grâce à leurs relations et clairement pas leur talent, une écriture et une réalisation paresseuses ainsi qu’un côté comédie lourdingue et mal branlé. Et si nous ne sommes pas tombés au niveau des bouses habituelles avec Christian Clavier ou Kad Merrad, on reste à des années-lumière des meilleures sorties françaises récentes comme Titane, Kaamelott - 1er Volet ou encore Adieu les cons.

Le potentiel était bien là mais l’exécution laisse vraiment trop à désirer pour convaincre. Bien sûr, pour les amateurs de films d’action et surtout pour les fans de JCVD, le visionnage peut se conseiller. 2-3 scènes de castagne, 2-3 répliques qui font mouche, Van Damme qui fait le taf, il n’en faudra pas plus pour faire lâcher quelques sourires en coin à certains. Malheureusement il ne faut rien espérer de plus et surtout arriver à passer outre les nombreuses scènes loupées et autres passages vraiment gênants de nullité. Bref, Jean-Claude, je t’apprécie toujours autant… mais tu mérites tellement mieux que ça, tellement mieux qu’un film français bas de gamme qui se sert beaucoup trop de ton image pour permettre à tout un tas de gens médiocres et sans talent de cachetonner sur ton dos. J’espère que ça ne sera pas ton dernier film.

 

 

Post publié par Damzé le 06/09/2021 12:43

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