Zone Dubitative

Expeditions : Rome [PC]

Quand on tient un bon concept, pourquoi le lâcher ? C'est sûrement ce que se sont dit les petits gars de chez Logic Artists avec leur licence Expeditions. Première bonne idée, une recette savoureuse. A savoir : une bonne grosse louche de combats tactiques au tour par tour, 2 ou 3 cuillères à soupe bien généreuses de RPG, le tout saupoudré de quelques pincées de stratégie/gestion. Deuxième bonne idée, choisir à chaque fois une période historique et un contexte qui s'y prête. Pour le premier Expeditions, nommé Conquistador, c'était la conquête du nouveau monde par les espagnols qui servait de toile de fond. Pour le second, Viking, c'était les raids de ces fameux guerriers du Danemark vers les îles anglaises. Et enfin pour le troisième, celui qui nous intéresse aujourd'hui et qui se nomme Rome, c'est l’extension de l'empire romain période Jules César qui sert de base.

Alors, est-ce que la formule reste toujours aussi intéressante ? Phil Spencer a t-il un ancêtre gaulois nommé Sérizix ? Comme on aimait le dire à l'époque avant de lire un test : Pavé César.

 

Vae Victis

Vous avez toujours rêvé d'un RPG se déroulant dans la Rome antique ? D'étendre l'influence de l'empire romain en dirigeant des légions ? De faire face aux batailles mais aussi aux complots politiques ? Alors Expeditions: Rome (ER) est fait pour vous. Après une courte introduction qui présente les enjeux, le joueur est progressivement plongé dans le bain à l’aide de plusieurs petites phases qui vont lui proposer de se familiariser avec les différentes couches de gameplay. Première couche : les combats au tour par tour qui sont vraiment le cœur du jeu. ER vous propose de diriger une équipe pouvant compter jusqu'à 6 personnages. Ses derniers se déplacent en fonction de leur nombre de points de mouvements et peuvent effectuer différentes tâches via des points d'action. Ce que les personnages vont pouvoir faire va dépendre de leur classe. Plusieures sont proposées avec par exemple le Princeps qui est le combattant classique en armure avec une épée et un bouclier qui le rend très fort en défense, le Triarus qui se bat avec de longues armes à 2 mains (lances, tridents) et qui peut buffer ses coéquipiers ou encore le Sagittarius qui est un archer. Et comme nous sommes dans un RPG, chaque classe a ses spécialisations qui sont au nombre de 3. 3 branches différentes dans lesquelles le joueur pourra dépenser ses points d'XP pour obtenir de nouvelles compétences. Si on reprend le Sagittarius, on peut par exemple se spécialiser dans la branche Marksman qui sert à défendre des zones et à harceler l'ennemi. La branche Hunter permet à l'archer d'être plus polyvalent en le rendant par exemple plus efficace au corps à corps. Et enfin, la branche Sniper permet de se focaliser sur les tirs meurtriers à longue distance. Bref, il y en a absolument pour tous les goûts et les possibilités pour optimiser son équipe sont nombreuses et très fun à tester.

Deuxième couche, l'aspect RPG. Au début du jeu, le joueur est invité à se créer un personnage. La création reste sommaire en terme de personnalisation de l'avatar (choix du sexe, quelques coupes de cheveux, la taille), le plus intéressant étant clairement le choix de la classe. Un fois ceci fait, il faudra composer son équipe et pour ça, 2 solutions possibles. En premier lieu, les compagnons. Ce sont des personnages avec une histoire, des dialogues, des quêtes et qui interagissent énormément avec le joueur en fonction de leur caractère et des décisions prises. Comme ils ont tous un background établi, impossible de choisir leur classe qui est déjà prédéterminée. Cependant, il est bon de noter que le jeu fait en sorte de fournir au moins un compagnon de chaque classe. Mais si vous voulez une team plus personnalisée, vous pourrez également recruter des centurions contre de l'argent. Il vous sera alors possible de les choisir en fonction de leur classe, de les équiper, etc. Par contre, ils n'ont pas de dialogues et pas d'histoire, ce qui en fait des collègues de voyage beaucoup plus fades. Au fil de l'aventure, le joueur devra prendre beaucoup de décisions. Épargner un ennemi, s'allier avec un groupe plutôt qu'un autre, etc., autant de petits choix qui peuvent paraître insignifiants mais qui, pour certains, auront une importance cruciale plus tard et notamment à la fin. Naviguer entre les batailles, les complots, les alliances et les trahisons, se révèle vraiment jouissif si on accroche à l'ambiance du jeu. A noter, des romances sont également de la partie.

Dernière couche, la stratégie/gestion. Si on commence le jeu comme simple soldat, on se retrouve vite à la tête d'une légion. Une fois ceci fait, tout un nouveau pan de gameplay s'ouvre alors au joueur. ER se décompose en 3 actes qui représentent 3 grandes régions. L'Asie mineure, l'Egypte et la Gaule (non, il n’y aura pas de jeux de mot basés sur ce nom dans le test). A chaque arrivée dans une région, le joueur se retrouvera face à une map à parcourir, découpée en plusieurs territoires qu'il faudra conquérir. Première étape, envoyer sa légion attaquer une ville principale ce qui déclenchera une bataille à grande échelle de plusieurs milliers d’hommes. Via des écrans de gestion, le joueur devra alors choisir ses commandants et les différentes tactiques à employer pour attaquer, se replier, etc. Chaque bataille se déroule en 4 étapes et le vainqueur est celui qui a le plus d'hommes en vie à la fin. Attention, les batailles en question ne montrent pas les armées se battre comme dans un jeu de stratégie, les unités sont représentées par des icônes sur une carte 2D, nous ne sommes pas non plus dans un Total War. Malgré tout, ces séquences restent fort sympathiques à jouer. Une fois la ville prise, le territoire est annexé mais pas pacifié. Pour le pacifier, il faudra en général supprimer les dernières poches de résistance et cela se fera par le biais des combats classiques du jeu en équipe de 6. A ceci prêt que votre personnage principal n'y participera pas, il déléguera cela à l'un de ses compagnons qui devra prendre avec lui 5 centurions engagés. Une bonne idée puisqu'elle oblige le joueur à se servir du système de recrutement et à ne pas se reposer uniquement sur les compagnons. Une fois ceci fait, le territoire devient romain et ses ressources sont à vous. "Des ressources ? Pour quoi faire ?". Et bien tout simplement pour upgrader votre camp. A chaque fois que la légion du joueur est stationnée quelque part, elle monte son camp. Une fois dans ce dernier, on peut y améliorer moult choses. De meilleures défenses, un système de recrutement des centurions plus efficaces, un hôpital pour les blessés, une armurerie pour crafter des équipements, etc. Un aspect gestion vraiment plaisant qui donne l'impression de vraiment diriger sa petite armée. D'autant plus qu'il faudra veiller à ce que les soldats aient assez de rations, de quoi se soigner et que le moral des troupes reste bon sous peine de mutineries. Il est également courant que des armées ennemies reviennent attaquer des régions déjà prises, dans ce cas il faudra envoyer votre légion les défendre sous peine de les perdre. Dernier point, quand le joueur se balade librement sur la carte avec son équipe de 6, il peut être interrompu par des événements spéciaux retranscrits sous forme textuelle (un peu comme dans un Livre dont vous êtes le héros). Que ce soit une embuscade, croiser des caravanes de marchands, un lieu mystérieux à explorer, des rencontres avec des habitants, il y aura encore et toujours des choix à faire.

 

Veni Vedi Vici

Chacun des actes du jeu propose une grosse quête fil rouge liée au protagoniste créé par le joueur, beaucoup de décisions importantes à prendre mais également plusieurs quêtes annexes à remplir. Chaque nouvelle région propose une patte graphique, des ennemis et une ambiance qui lui est propre. Il est bon de noter que l'on pourra croiser pas mal de personnages historiques comme par exemple Cléopâtre, Pompée ou encore Vercingétorix. Pour autant, le jeu prend des libertés avec l'histoire et n'est pas forcément fidèle à la réalité. Ce qui n'est pas un défaut puisque ça permet au joueur d'avoir un impact encore plus important et de vraiment modeler sa partie comme il l'entend. Entre chacun des 3 gros actes, une fois un territoire conquis dans son intégralité, il faudra alors rentrer à Rome et combattre une nouvelle fois mais avec les mots. Vengeance, complot, joutes verbales au sénat, tout y est. Mais ce que réussit le mieux ER, c'est sans conteste ses fins d'actes. A chaque fois qu'une map sera totalement passée sous pavillon romain, il faudra livrer une dernière bataille épique comme par exemple les sièges d’Alexandrie ou d'Alésia. Il faudra alors choisir un plan d'attaque et composer des équipes parmi les compagnons et les centurions. Par exemple envoyer des personnages qui encaissent bien en première ligne faire diversion pendant qu'une équipe de personnages plus mobiles s'occupera d'aller brûler un pont, coupant ainsi la route à d'éventuels renforts ennemis.  Le tout pendant qu'une dernière équipe, plus furtive, s'introduit en douce chez l'ennemi pour tenter de le surprendre. Longues, tendues et prenantes, ces grandes batailles sont toujours extrêmement réussies et sont un vrai régal à jouer.

Pour ceux qui aiment optimiser leur équipe à fond, qui aiment les combats au tour par tour vraiment tactiques, ER se présente comme un morceau de choix. Il se paie en plus le luxe d'être un vrai RPG avec de nombreux choix multiples et une histoire plutôt bien écrite qui donne envie d’en voir la fin. Une fin en apothéose ou tous les enjeux et les personnages croisés se mélangent pour offrir un ultime baroud d’honneur et un ending personnalisé en fonction des actions du joueur tout au long de l'aventure.

Les musiques sont réussies et collent bien aux différentes régions/ambiances, le jeu est doublé en anglais et entièrement traduit en français et, cerise sur le gâteau, il est dans le Game Pass... PC. Oui, pour l'instant, la série des Expeditions n'est disponible que sur PC et c'est bien dommage. Bien sûr, on imagine aisément pourquoi avec notamment l'absence de clavier/souris sur console et donc la difficulté d'adapter un gameplay aussi fourni à la manette tout en essayant de garder le tout ergonomique. Ce qui est toujours une tâche très compliquée mais que d'autres studios ont tenté. La balle est dans le camp des développeurs. Signalons également que si ER possède une DA efficace, il est loin d'être une vitrine technologique. Les décors sont plutôt jolis mais les personnages manquent de détails. L'avantage, c'est que le jeu n'est pas ultra gourmand en ressources et qu'il pourra tourner sur des configurations assez anciennes ou modestes.

 


Alea Jacta Est
Au moment de franchir le rubicon et de donner son verdict final concernant Expeditions: Rome, que dire si ce n'est que n'est que le jeu se révèle excellent et très prenant. Très riche et varié dans son gameplay, il propose à la fois des combats extrêmement réussis mais également un aspect RPG assez poussé. La composante gestion de troupes/batailles à grande échelle n'est certes pas au niveau d'un vrai gros jeu de stratégie mais reste un ajout très sympathique qui améliore grandement l'immersion. Avec une durée de vie solide (comptez sur une bonne quarantaine d'heures) et une bonne rejouabilité, Rome s'impose comme le plus abouti et réussi des Expeditions. Il donne vraiment au joueur l'impression de vivre une grande aventure et d'avoir un impact sur l'Histoire avec un grand H en le faisant interagir avec des figures connues et participer à des batailles telles que le siège d'Alésia face à Vercingétorix. Les différentes couches de gameplay se superposent admirablement bien entre elles pour former un tout vraiment solide et équilibré. Même les novices ou ceux ayant peur de l'aspect tactique/gestion pourront tenter l'expérience sans peur grâce aux différents niveaux de difficultés bien pensés. C’est donc un gros pouce levé que nous adressons à Logic Artists. Après tout, que demande le peuple, si ce n’est du pain et des jeux… vidéo.

 

Post publié par Damzé le 02/02/2023 11:29

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