Zone Dubitative

A Plague Tale - Requiem [Xbox Series X]

Quand ils ont sorti A Plague Tale: Innocence en 2019, les développeurs de chez Asobo ont surpris un peu tout le monde en s'attaquant au genre action/aventure. Avec moins de moyens que les gros mastodontes rompus à la discipline, le petit studio bordelais avait pourtant réussi son pari. Innocence racontait les aventures d'Amicia et Hugo, 2 enfants, frère et sœur, livrés à eux-même dans une France du 14ème siècle ravagée par la peste et la guerre. Une histoire aussi touchante que tragique, avec une pointe de surnaturel, qui avait su atteindre beaucoup de joueurs en plein cœur.

Avec Requiem, Asobo nous propose de découvrir la suite des aventures d'Amicia et Hugo. Auréolée d'un beau succès critique et commercial, la licence revient avec un nouveau statut : être l’un des jeux les plus attendus de l'année. Est-ce que Requiem tient ses promesses ? Le studio Asobo a-t-il encore franchi un cap ? Faite le plein de raticide, c'est parti pour le test.

 

Asobo ? Ah c'est beau !

Disponible uniquement sur next gen, Requiem avait provoqué un mini tollé au moment où les configurations PC avaient été dévoilées. La cause ? Ces dernières étaient particulièrement musclées même pour le 1080p (RTX 3070 recommandée pour l'ultra). Sur console ? 30 fps seulement et de la 2K (1440p) en résolution. De quoi faire grincer des dents ?

Pas vraiment. Rangez vos fourches car graphiquement, Requiem est tout simplement magnifique. Dès les premières secondes, le décrochage de mâchoire est immédiat. C'est beau, la gestion des couleurs est parfaite, la distance d'affichage est énorme. Et cette baffe graphique, cet effet "waow" va se répéter à chaque nouveau lieu découvert. Pour ceux qui aiment prendre des captures d'écran, le dernier né du studio Asobo est une véritable usine à screenshots.

D'une variété folle, le jeu nous fait passer de la rase campagne à la grande ville fortifiée ou encore d'un voyage en bateau à une exploration de vieilles ruines avec une aisance et une fluidité admirables. Du début à la fin, le souffle de l'aventure avec un très grand A balaie Requiem pour offrir aux joueurs un voyage inoubliable. Le gap graphique et technique avec le premier opus est monumental y compris dans la modélisation des personnages avec notamment des textures de qualité qui laissent apercevoir le grain de peau et beaucoup de détails sur les costumes. On sent qu'Asobo a décidé de jouer dans la cour des grands. Le pari est réussi tant Requiem s'impose sans mal comme l'un des plus beaux jeux de ces dernières années.

Mais ne l'oublions pas, le succès d'Innocence, certes déjà joli visuellement, reposait également sur un scénario, une ambiance et une écriture vraiment prenants.

 

The Last of Uncharted

Le premier jeu, avec sa relation sœur/frère aussi centrale qu'importante, lorgnait déjà un peu sur les terres de The Last of Us. D'un côté, il y avait Amicia, la grande sœur obligée de devenir adulte bien trop vite et de devoir faire face à l'énorme responsabilité de s'occuper de son jeune petit frère. De l'autre, Hugo, guère plus qu'un enfant dont l’innocence allait être sacrifiée car frappée par des malheurs et des drames. On assistait à la naissance d'un duo touchant. Les rigolades, les déchirements, les difficultés, tout était prétexte à l'évolution de cette relation au travers d'une aventure qui gardait un côté assez intimiste, très centrée sur ses protagonistes.

Pour Requiem, Asobo a clairement changé de braquet. Bien évidemment, la relation Amicia/Hugo reste l’élément central mais les péripéties vécues par le duo abandonnent souvent le côté intimiste d'Innocence pour aller chasser cette fois sur les terres d'Uncharted. Beaucoup plus spectaculaire, beaucoup plus rythmé, le voyage de nos 2 jeunes héros sacrifie une partie de son aspect "petite histoire" sur l'autel du grand spectacle. Certains n'apprécieront peut être pas ce changement mais manette en main, dur de bouder son plaisir. De petit film de série B très sympathique qui joue habilement avec les limites de son budget, A Plague Tale évolue vers le gros blockbuster. Est-ce que ça veut dire que la licence y perd un peu de son âme ? De son identité ?

Non, absolument pas. Requiem est tout sauf une copie des 2 jeux cités plus haut, il prend des qualités présentes chez l'un et chez l'autre et les fusionnent pour former un tout cohérent tout en conservant son identité très forte et ce petit supplément d'âme, ce côté "fait avec le coeur" qui le fait se démarquer de la concurrence. Il faut dire que la DA toujours aussi remarquable et maîtrisée ainsi que les sublimes musiques d’Olivier Derivière aident bien. La relation Amicia/Hugo reste aussi touchante qu’avant si ce n’est même plus et le scénario se veut haletant et parfaitement rythmé. On pourrait faire la fine bouche sur les quelques errements présents au niveau de la narration et de l’écriture avec une poignée de passages un peu abrupts et certains personnages très clichés mais globalement, le travail effectué reste vraiment bon. Du début à la fin, de la première à la dernière seconde, on ne s'ennuie pas. Tantôt calme et contemplatif, tantôt déchainé et fougueux, Requiem trace sa route en emportant le joueur dans son sillage pour ne le relâcher qu'à la toute fin. Une fin aussi spectaculaire qu’émouvante qui vient conclure admirablement bien l'histoire d'Amicia et Hugo.

 

Une recette améliorée

Résumons donc. Le jeu est magnifique, les musiques sont sublimes, le voyage d'Amicia et Hugo est aussi spectaculaire qu’inoubliable, ne reste alors qu'un dernier point à aborder : le gameplay.

Quand on a une recette qui marche, on ne l'abandonne pas. C'est ce qu'ont fait les gens de chez Asobo en reprenant les bases d'Innocence pour les améliorer et les affiner. Le gameplay de Requiem, s'il conserve les mêmes bases que celui de son cadet, se veut donc plus fluide, plus précis et plus varié. On retrouve toujours ce mélange savamment dosé, composé d'exploration, d'énigmes, de furtivité et d'action et il fonctionne encore mieux qu'avant. C'est bien plus agréable manette en main. L'IA des adversaires, si elle n'est pas incroyable, fait le travail. Assez pour donner suffisamment de fil à retordre à ceux voulant vraiment axer leur style de jeu sur la discrétion pour qu'ils ne s'ennuient pas. Mais là où Innocence forçait le joueur à faire constamment profil bas, Requiem n'hésite pas à le pousser un peu plus vers l'action. Pas d'inquiétude, Amicia ne se transforme pas pour autant en Rambo capable de tuer des dizaines d'ennemis à la chaîne. La prudence reste de mise mais disons que la demoiselle à sérieusement musclé son jeu. Et tout cela à un impact puisqu'elle dispose maintenant de 3 barres d'expérience qui vont se remplir en fonction de ses actions. Une pour la furtivité (qui augmente quand on évite le conflit), une pour tout ce qui est offensif (qui augmente quand on se débarrasse du maximum d’ennemis en les tuant) et une dernière pour l'utilisation des munitions, de tout ce qui est liés au craft et à l’utilisation de l’environnement (qui augmente quand on utilise le feu ou les rats pour se débarrasser des gêneurs par exemple). L'intérêt de ces barres, c’est qu'elles débloqueront de nouvelles compétences comme marcher plus vite en étant accroupi, pouvoir pousser des ennemis ou encore pouvoir crafter avec moins de matériaux. Et puisque que nous parlions du craft, ce dernier se veut toujours aussi important. Avec plusieurs types de munitions (qui peuvent parfois se combiner entre elles), de nouvelles armes qui viennent épauler la fronde et le fait de pouvoir utiliser certains éléments des décors de plusieurs façons, Requiem arrive à bien varier ses différents styles d'approches tout en laissant le joueur assez libre de ses mouvements. La conséquence de tout ça, c'est un gameplay qui tient bien mieux la route sur la longueur que celui d'Innocence qui avait tendance à vraiment s'épuiser sur la fin.

 


Une excellente suite
Requiem est tout simplement un coup de maître pour Asobo. La preuve qu'un studio d'une taille plutôt modeste peut, avec du talent et du cœur, arriver à se hisser dans la cour des grands pour proposer un jeu marquant qui n'a rien à envier aux gros AAA déjà disponibles sur le marché. Dans un milieu ou Sony règne en maître avec Uncharted et The Last of Us, Requiem débarque en alliant le meilleur des 2 mondes puisque le jeu propose une histoire poignante avec des personnages auxquels on s'attache énormément mais également une grande aventure pleine de rebondissements et de moments spectaculaires. En fait, Requiem est à l'image de son héroïne principale, Amicia. Comme elle, le jeu gagne en confiance, en expérience et en maturité pour évoluer et grandir.

Graphiquement sublime, Requiem nous raconte de manière très efficace une histoire aussi inoubliable que marquante. Parfaitement rythmé, alternant les moments calmes propices au développement du scénario et les passages spectaculaires avec brio, proposant un bon mix entre l'exploration et la résolution d'énigmes, le dernier né du studio Asobo améliore aussi grandement un gameplay fondé sur les bases du premier jeu pour le rendre plus fluide, agréable et varié.


Mais s' il ne fallait retenir qu'une chose, ce serait assurément le souffle de l'aventure avec un très grand A qui balaie constamment le jeu de sa première à sa dernière seconde. Avec ses décors extrêmement nombreux et variés, tantôt enchanteurs, tantôt cauchemardesques, avec sa relation Amicia/Hugo toujours aussi touchante et bien écrite, avec sa galerie de personnages marquants, on pardonnera aisément à Requiem ses quelques errements. La narration est parfois un peu trop abrupte sur certains passages, l'écriture est un poil trop clichée sur quelques personnages mais rien qui ne vienne vraiment gâcher la fête. Finalement, le point qui divisera le plus restera sûrement la nouvelle orientation de la licence vers quelque chose de beaucoup plus spectaculaire au détriment du côté plus intimiste/survie présent dans Innocence. Quoi qu'il en soit, Requiem est assurément l'un des jeux de l'année et incontestablement l'une des plus grosses claques graphiques next gen mais il est surtout la preuve du talent des développeurs de chez Asobo qui démontrent ici qu'ils ont largement les épaules nécessaires pour jouer dans la cour des grands.

 

Post publié par Damzé le 02/02/2023 11:42

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